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Fin d'ère - Nouvel air
7 juin 2004

06- Les mystères de la conclavite

7.

 

Roland fait partie de ces cadres impossibles à joindre au téléphone et que vous ne pouvez voir avant longtemps, car il est toujours en réunion. Devenues l’activité principale de nombreux managers, les réunions ne sont pas seulement le prétexte des rendez-vous manqués, elles sont aussi dévoreuses de temps et d’énergie. Roland, que j’ai fini par rencontrer, nous parle en expert de ce sujet préoccupant. Vous le reconnaîtrez.

 

Apparemment vous êtes souvent en réunion ?

Ne m’en parlez pas, ça devient catastrophique. On ne peut plus faire notre boulot avec toutes ces réunions. Si encore ça servait à quelque chose, mais même pas. Tous les prétextes sont bons, les résultats hebdos, mensuels, trimestriels, les nouveaux produits, la communication, la qualité, la nouvelle stratégie. J’ai calculé que, grosso modo, ça me prenait la moitié de mon temps et les trois quarts de mon énergie. Parce que, bien entendu, on ne peut pas y aller les mains dans les poches, il faut préparer les documents, fourbir ses armes et ses arguments. Je ne vous dis pas dans quel état se trouvent ma secrétaire et le photocopieur la veille d’une réunion.

Pourquoi dites-vous que ça ne sert pas à grand chose ?

Parce que, généralement, les gens ont mal préparé leur dossier, parce que ça tourne vite en querelle de personne ou en monologue, parce que ça ne se concrétise que rarement par des décisions. Il n’est pas rare d’avoir 10 points à traiter et de ne pas dépasser le troisième. Ce qui est fascinant dans nos réunions c’est la période de chauffe ; elle occupe 90 % du temps et fait que l’on passe plus de temps sur des questions annexes que sur les sujets essentiels. De plus, entre ceux qui arrivent en retard et les dépassements d’horaires systématiques, on ne peut plus tenir son agenda. A ce propos, chaque fois que je rentre à mon bureau je n’ai qu’une appréhension c’est de regarder mon agenda et de découvrir une nouvelle réunion décidée en haut lieu, prise dans mon dos par ma secrétaire.

Alors pourquoi continuer à en faire autant ?

Ne le répétez pas, mais je crois qu’il y deux catégories de cadres. Il y a ceux qui ne savent pas manager et qui trouvent dans l’organisation de réunions un moyen astucieux d’occuper leur agenda et de faire de l’activisme. Et puis il y a ceux, comme moi, qui ont peur de ne pas y assister, au cas où un jour, improbable il est vrai, quelque chose d’important s’y dirait. En fait, par expérience, les choses importantes se disent toujours en aparté et avant.

Je croyais que ce qui était important , c’était ce qui se passait après.

Moi aussi dans le temps ! Mais en fait dès que vous sortez vous êtes happés par la foule de vos autres activités. Et dans le meilleur des cas vous recevez un compte rendu qui retrace plus le vécu du scribe de service que de la réunion. Vous y jetez un coup d’œil rapide et vous découvrez avec effroi qu’une réunion de synthèse a été fixée la semaine d’après. Et là, vous vous dites qu’il va falloir encore mobiliser toute votre équipe pour la préparer.

Comment en sortir ?

En n’y rentrant pas, bien sûr. Pour être sérieux, je crois que l’on devrait chiffrer le temps passé en réunion et le mettre en face des résultats obtenus. Mieux encore, je crois que l’on devrait facturer en interne nos coûts de participation aux organisateurs. Peut-être y réfléchiraient-ils à deux fois au lieu de convoquer le banc et l’arrière banc à chaque sécrétion hormonale.

J’aurais tout de même tendance à dire que c’est un phénomène qui s’amplifie, plus exactement qui se sédimente. On crée plus de réunions que l’on en supprime. Plus les problèmes sont graves et demandent une attention réfléchie, plus on crée de réunions et par là même on crée des perturbations. Les réunions sont devenues un phénomène galopant, relevant de l’arbitraire de chacun, et soumis à aucun contrôle, ni a priori, ni a posteriori. S’il n’y avait pas toutes ces réunions, je suis sûr que je pourrais être un manager disponible pour mes collaborateurs. Mais il ne faut pas rêver.

 

REFLEXION

Le petit poisson rouge est-il le mieux placé pour parler de son bocal ?

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Commentaires
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  • A un moment où tout semble battre de l'aile, comment tout en s'indignant à juste titre des comportements hallucinants des organisations, trouver de nouvelles pistes pour redonner du sens à la vie collective ?
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